l’enquête sur la lecture de bandes dessinées en france

La Cité présente des données chiffrées inédites, issues de la vaste enquête nationale La lecture de bandes dessinée menée en partenariat par la BPI (Bibliothèque publique d’information du Centre Pompidou) et le DEPS (Département des études, de la prospective et des statistiques du ministère de la Culture et de la Communication) auprès de 4.580 personnes âgées de 11 ans ou plus représentatives de la population française (et 401 enfants de 7 à 10 ans interrogés indirectement par l’intermédiaire de leurs parents), réalisée par TMO Régions. Responsabilité et éléments de méthodologie pour mieux appréhender cette enquête.

Près d’une personne sur trois (32%) : c’est la part des lecteurs actuels de bandes dessinées parmi la population de France métropolitaine âgée de 7 ans et plus. Les anciens lecteurs en constituent la plus forte proportion (44%). Le cumul des lecteurs actuels et des anciens lecteurs porte ainsi à 76% le pourcentage d’individus ayant déjà lu des bandes dessinées.

L’âge est un facteur très discriminant de la lecture de bandes dessinées. Entre 7 et 17 ans, une nette majorité de personnes (un peu plus de trois sur quatre) lit des BD. À partir de 18 ans, les lecteurs de BD deviennent minoritaires et ce, de plus en plus au fur et à mesure que l’âge augmente.

Pouvant être qualifiée de pratique plus courante chez les jeunes, la lecture de bandes dessinées ressort également comme une pratique plus masculine que féminine. Ainsi, au sein de la population âgée de 11 ans et plus, la proportion d’hommes lecteurs se déclarant lecteurs actuels de BD atteint 38%, contre 21% chez les femmes, soit un écart non négligeable de 17 points entre les deux sexes.

Il peut être dressé le profil des lecteurs de bandes dessinées, issu des données d’enquête, comparé au profil de la population française issu des données du dernier recensement de la population conduit par l’Insee et millésimé 2008. Plus masculin, plus jeune, deux fois plus élevé socialement et diplômé, le lectorat de bandes dessinées se distingue fortement de l’ensemble de la population.

Il existe un lien manifeste entre le fait d’effectuer des sorties culturelles et le fait de lire des bandes dessinées. Parmi les personnes ne se rendant jamais au cinéma, à un concert, ne fréquentant jamais les musées ou les bibliothèques, la part des lecteurs de bandes dessinées dépasse à peine les 15%, alors qu’ils sont 45% des personnes se rendant au moins 6 fois par an au musée.

On trouve, parmi les personnes déclarant jouer aux jeux vidéo ou jeux en réseau, une proportion plus importante de lecteurs de bandes dessinées (50%) que chez les personnes ne pratiquant pas cette activité (17%), soit quasiment un rapport de 1 à 3 entre joueurs et non joueurs.
La fréquence de jeu génère quelques variations : les individus jouant au moins une fois par semaine comportent 54% de lecteurs de bandes dessinées, ceux jouant moins d’une fois par semaine 39%.

Les personnes ne lisant pas de journaux d’information ou de magazines sont moins lectrices de bandes dessinées : seules 15% lisent des BD, contre environ 25% au sein des lecteurs de journaux ou magazines. Les gros lecteurs de magazines ou revues (en « consommant » tous les jours ou presque) comptent en leur sein 40% de lecteurs de bandes dessinées.

Avec une grande constance, chez les faibles lecteurs ou gros lecteurs de livres (hors bd), on trouve la même proportion de lecteurs de bandes dessinées : environ 40%.

Une fois mis en évidence que les lecteurs de livres (hors BD) sont aussi plus lecteurs de bandes dessinées que la moyenne, se pose la question des types de lectures s’associant les plus forts pourcentages de lecteurs de BD. Il ressort ainsi que les personnes lisant notamment des ouvrages techniques, scientifiques ou professionnels se composent pour moitié de lecteurs de bandes dessinées (49%) là où les personnes lisant notamment des romans en comportent 35%.

Un zoom sur lecteurs de romans a été effectué avec pour objectif de repérer les catégories de romans se mariant le plus fréquemment avec la lecture de la bande dessinée. On observe ici des résultats plus contrastés. Ainsi, les lecteurs de romans érotiques et les lecteurs de romans de science fiction, fantastique, horreur (notamment) sont plus lecteurs de BD (respectivement à 56% et 53%). Ces univers sont également bien représentés dans la bande dessinée et les lecteurs qui les apprécient passent sans doute facilement d’un genre à l’autre.

Les albums traditionnels, séries franco-belges ou européennes sont le genre de la bande dessinée comptant le plus de lecteurs : 27% de la population âgée de 11 ans et plus déclare en avoir lus durant l’année écoulée. À un second niveau figurent les comics et autres bandes dessinées américaines, les journaux d’humour et de bandes dessinées et les mangas et autres bandes dessinées asiatiques, qui comptent respectivement 16%, 15% et 12% de lecteurs au sein de la population. Plus confidentiels sont les romans graphiques ou bandes dessinées alternatives, avec leurs 6% de lecteurs.

Chaque catégorie d’âge est plus ou moins lectrice des différents genres de la bande dessinée ainsi que le montre l’analyse des taux de lecture par genre et âge conduite sur la base des lecteurs actuels de bandes dessinées.

Parmi les lecteurs de bandes dessinées, les hommes se déclarent un peu plus lecteurs que les femmes sur tous les genres excepté les romans graphiques. Cependant, les écarts demeurent dans l’ensemble assez ténus, signe que les différents genres de la bande dessinée ne sont pas sensiblement plus masculins ou féminins. Au maximum, le différentiel se monte à 7 points s’agissant des comics et des mangas, dont les hommes sont plus lecteurs que les femmes.

Selon les genres de bandes dessinées lus, les « consommations » annuelles oscillent. Les mangas occasionnent de manière assez nette les « consommations » les plus fortes : il en est lu en moyenne un peu plus de 18 au cours de l’année. En outre, parmi les personnes lisant ce genre de bandes dessinées se trouvent plus qu’ailleurs des gros lecteurs : 11% déclarent avoir lu 50 mangas et plus et 21% (soit 1 lecteur sur de mangas sur 5) déclarent en avoir lus 20 et plus.

Les résultats d’enquête permettent d’évaluer le nombre moyen de bandes dessinées lues par l’ensemble de la population (pas uniquement celle des lecteurs de bandes dessinées) ce, par genre. Connaissant la taille de la population via les données du Recensement de 2008, il est donc possible, en lui appliquant les moyennes issues de l’enquête, de calculer une estimation théorique du volume annuel de bandes dessinées lues dans l’année (toujours par genre).

Les « parts de marché » de chaque genre de la bande dessinée s’avèrent relativement fluctuantes selon les âges. Les 11-14 ans restent finalement assez proche de la moyenne même s’ils lisent un peu plus de mangas : 29% des bandes dessinée qu’ils lisent appartiennent à ce genre, contre 23% au global. Cette surreprésentation des mangas est nettement plus prononcée chez les 15-17 ans puisque près d’une bande dessinée sur deux lue par cette tranche d’âge est un manga.

Les petits lecteurs multi-genres constituent numériquement le groupe le plus important au sein des lecteurs de bandes dessinées : près d’un sur cinq en fait partie. On trouve ensuite le groupe des lecteurs quasiment exclusifs d’albums traditionnels, qui réunit 14% des lecteurs de bandes dessinées. Trois autres groupes pèsent un peu plus de 10% : les moyens lecteurs de mangas et albums traditionnels, les petits lecteurs exclusifs d’albums traditionnels et les moyens lecteurs d’albums traditionnels et de journaux d’humour.

En considérant l’ensemble de la population âgée de 7 ans et plus, il a été lu en moyenne près de neuf bandes dessinées au cours des 12 derniers mois. Ramenée aux seuls lecteurs de BD, la moyenne est de 27 bandes dessinées lues au cours de l’année !

450 millions de bandes dessinées sont lues en France par an. Les 11-14 ans constituent le premier public de la bande dessinée. Connaissant déjà le taux de lecture le plus élevé (90%), ils sont aussi ceux qui lisent en volume le plus de bandes dessinées : un quart des bandes dessinées lues le sont par ce groupes d’âge. À un second niveau, on trouve les 7-10 ans, les 18-24 ans, les 30-39 ans, les 40-49 ans et les 50-59 ans, chacune de ces tranches d’âge s’associant 11% à 13% des bandes dessinées lues.

Il apparaît que les plus gros lecteurs de livres comptent les plus fortes proportions de gros lecteurs de bandes dessinées. Parmi les lecteurs ayant lu 50 livres et plus, 15% ont lu par ailleurs 50 bandes dessinées et plus là où ils ne sont moins de 5% au sein des lecteurs ayant lu moins de 10 livres. De ce point de vue, il ressort donc que lorsqu’on est lecteur de livres et de bandes dessinée, plus on lit des uns et plus on lit des autres.

Appelés à se prononcer sur ce que représente prioritairement la bande dessinée à leurs yeux, les lecteurs en parlent d’abord comme d’un divertissement : 30% émettent cette opinion. Ensuite il y a l’idée, partagée par 22% des lecteurs, que la bande dessinée est surtout un moyen de s’évader. Recueille presque autant de citations (19%) l’avis selon lequel la bande dessinée est un passe-temps comme un autre. La bande dessinée évoque une nostalgie de l’enfance pour 14% des lecteurs. Enfin, moins de 10% la voient principalement comme une pratique culturelle ou une passion dévorante.

Un peu plus d’un lecteur de bandes dessinées sur cinq (22% précisément) estime que s’il ne pouvait plus du tout lire de bande dessinée pendant six mois, cela lui manquerait beaucoup. Le positionnement le plus fréquent est toutefois celui d’un attachement modéré à la bande dessinée : 42% des lecteurs disent en effet que ne pas lire de bande dessinée durant six mois leur manquerait un peu. Le faible attachement est aussi plus présent que le fort attachement, 35% des lecteurs jugeant que s’abstenir d’en lire pendant six mois ne leur manquerait pas du tout.

Actuellement, deux modalités de lecture prédominent chez les lecteurs de bandes dessinées : 36% d’entre eux déclarent lire par période tandis que 32% lisent régulièrement tout au long de l’année. Toutefois, il est possible d’adjoindre aux premiers les 16% de lecteurs lisant des bandes dessinées principalement durant les vacances, auquel cas c’est un peu plus d’un lecteur de bandes dessinées sur deux qui en lit à certains moments de l’année (selon les sorties, ses propres envies, le temps dont il dispose…). Les personnes ne lisant qu’à titre exceptionnel représentent 15% des lecteurs de bandes dessinées, soit environ un lecteur sur six, proportion qui n’est finalement pas si réduite que cela.

Le choix des bandes dessinées à lire est dans une large mesure guidé par les propres aspirations du lecteur qui, dans 85% des cas, déclare se débrouiller tout seul pour sélectionner ses bandes dessinées. Malgré tout, il n’est pas rare qu’il ait recours à d’autres avis, en premier lieu ceux de son entourage : près d’un lecteur sur quatre (23%) dit que ses choix font suite à des discussions avec ses proches. Dans une moindre mesure sont consultés les avis émanant de la presse (par 11% des lecteurs), des sites ou forums consacrés à la bande dessinée (par 8% des lecteurs) et des libraires, bibliothécaires (par 8% les lecteurs également).

L’intérêt pour la bande dessinée ne se limite bien entendu pas à la lecture, mais peut s’exprimer à travers d’autres pratiques connexes. Cependant, une majorité de lecteurs (56%) ne s’y adonnent pas, se cantonnant uniquement aux pratiques de lecture alors que 44% font d’autres choses que lire. Les visites d’expositions de bandes dessinées sont les plus répandues : au global, 30% des lecteurs de bandes dessinées déclarent en effectuer. La recherche de dédicaces d’auteurs concerne 18% des lecteurs, tandis que 14% font eux-mêmes de la bande dessinée en amateur.

Au sein de la population française, l’opinion qui fait le plus consensus autour de la bande dessinée est que sa lecture relève d’une pratique à la fois ludique et divertissante : 92% des personnes interrogées expriment leur accord avec cette idée. Une autre opinion assez partagée est que la bande dessinée constitue un art à part entière : près de 80% des sondés y souscrivent, tandis que seuls 10% la réfutent. Les opinions selon lesquelles la bande dessinée éveillerait à la culture obtiennent des taux d’accord compris entre 65% et 70%. Une majorité de la population juge en effet que la bande dessinée peut donner le goût d’autres lectures, permettre de se cultiver, inciter à s’intéresser à d’autres formes d’art.

Quasi une personne sur deux déclare posséder personnellement des bandes dessinées au format papier parmi la population âgée de 11 ans et plus. Les lecteurs actuels de bandes dessinées en possèdent presque tous (87% sont dans ce cas), les anciens lecteurs sont 44% à en conserver chez eux alors que les non lecteurs sont assez peu à en avoir (seulement 10%).
Le pourcentage de possesseurs de bandes dessinées ne fait que diminuer avec l’âge : très élevé chez les 11-14 ans (89% disent en posséder), il commence à s’amenuiser dès 15 à 17 ans (se chiffrant tout de même à 75%). A partir de 18 ans et jusqu’à 59 ans, il reste compris dans une fourchette allant de 46% à 59%.

L’achat de bandes dessinées au format papier reste un acte relativement fréquent chez les lecteurs de bandes dessinées : 60% en ont effectué au cours des 12 derniers mois. Contrairement à la possession, l’achat de bandes dessinées est nettement sensible à l’âge. Certes, c’est parmi les 11-14 ans que l’on trouve la plus forte proportion d’acheteurs (67%), proportion qui tend ensuite à s’éroder entre 15 et 17 ans (53%) puis 18 et 24 ans (46%). Mais elle remonte entre 25 et 29 ans (57%), ce jusqu’à 40-49 ans (64%, soit un score très proche des 11-14 ans), avant de décliner à nouveau à partir de 50 ans. Deux lieux concentrent plus particulièrement les achats de bandes dessinées : d’une part la librairie ou l’espace culturel généraliste, d’autre part la grande surface. Respectivement 59% et 56% des acheteurs de bandes dessinées sont venus y effectuer un ou plusieurs achats. Les 15-17 ans sont plus coutumiers que les autres des achats de bandes dessinées en grande surface : 72% en ont effectué, soit 16 points de plus qu’en moyenne.

Près d’un lecteur de bandes dessinées sur deux dit avoir déjà emprunté au cours des 12 derniers mois une bande dessinée au format papier à une personne extérieure à son foyer (45%). Ces échanges sont plus courants aux jeunes âges : chez les lecteurs de 11-14 ans (60%) et 15-17 ans (52%). Les lecteurs de bandes dessinées se composent pour un tiers de personnes en lisant et en empruntant à la bibliothèque ou à la médiathèque. Ces pratiques sont bien plus fréquentes chez les lecteurs âgés de 11 à 14 ans puisqu’un peu plus de 60% d’entre eux disent lire des bandes dessinées à la bibliothèque ainsi qu’en emprunter. Dès 15-17 ans, ce pourcentage s’amoindrit, tombant à 40%. Par la suite, il passe sous les 30% dans la plupart des cas.

La lecture de bandes dessinées numériques paraît encore peu répandue chez les lecteurs de bandes dessinées : cela concerne en effet 14% d’entre eux. Toutes les catégories d’âge ne sont pas touchées de manière uniforme par cette pratique, qui est plutôt le fait des moins 40 ans et, de façon plus marquée encore, des 18-24 ans et des 25-29 ans : les premiers comptent 29% de lecteurs de bandes dessinées numériques et les seconds 23%.

En considérant l’ensemble des anciens lecteurs de bandes dessinées, leur abandon survient en moyenne un peu avant 21 ans. Si ce chiffre synthétise des situations plutôt contrastées d’une tranche d’âge à l’autre, un point de convergence peut néanmoins être identifié à travers les âges : les abandons s’effectuent majoritairement avant 25 ans. Trois principales raisons sont avancées par les anciens lecteurs de bandes dessinées pour expliquer leur abandon, provisoire ou définitif : elles tiennent à la perte d’intérêt pour cette activité (41% des anciens lecteurs fournissent cette explication), au manque de temps (40% de citations) et à l’inclination pour d’autres pratiques culturelles ou de loisirs (35% de citations).